🇪🇺🌎 Mercosur : Ce que l’accord change concrètement pour les vignerons français

Tarifs, codes douaniers, échéances : tout ce que les exportateurs de vin doivent anticiper avant l’entrée en vigueur de l’accord.

L’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les pays du Mercosur — Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay — amorce une transformation profonde des conditions d’accès au marché sud-américain. Pour les vignerons français, c’est une bascule stratégique : suppression progressive des droits de douane, reconnaissance des pratiques œnologiques européennes et simplification des procédures.

Si l’accord suscite, à juste titre, de vives tensions en France — notamment autour des volets agricoles, environnementaux et industriels —, il n’en demeure pas moins que la filière vitivinicole européenne y figure clairement parmi les secteurs bénéficiaires. Ce dossier propose une lecture claire des dispositions relatives au vin, afin de vous aider à vous positionner, prendre des décisions éclairées et saisir les opportunités à venir.

1. Ce que prévoit concrètement l’accord UE–Mercosur

✅ Un calendrier tarifaire par type de vin

Le texte de l’accord (Apêndice 2-A-2 : Lista de Eliminação Pautal do MERCOSUL) définit, pour chaque code douanier (SH/NCM), une catégorie de suppression des droits de douane.

Produit

Code SH (NCM)

Catégorie

Durée de suppression

Échéance

Vins tranquilles < 14 % vol.

2204.21.00

Catégorie 4

5 ans (20 % par an)

Tarif 0 % à partir de l’année 5

Vins effervescents (Champagne, Crémant)

2204.10.00

Catégorie 7

8 ans (12,5 % par an)

Tarif 0 % à partir de l’année 8

Vins fortifiés > 14 % vol.

2204.29.00

Catégorie 10

11 ans (9,1 % par an)

Tarif 0 % à partir de l’année 11

Cognac, Armagnac, spiritueux

2208.20.00 / 2208.90.00

Catégorie 15

16 ans (6,25 % par an)

Tarif 0 % à partir de l’année 16

💡 Les vins tranquilles bénéficieront d’une suppression tarifaire rapide, tandis que les effervescents et spiritueux auront un calendrier plus long.

2. Ce que cela change pour les exportateurs français

🎯 Une compétitivité prix renforcée

  • À valeur CIF identique, un vin tranquille vendu 10,50 € au Brésil voit son coût importateur grimper à ~18,27 € avec les taxes actuelles.

  • Supprimer les 27 % de droits de douane, c’est économiser ~2,84 € par bouteille — un levier crucial pour :

    • augmenter sa marge ;

    • réduire les prix de vente consommateurs ;

    • renforcer ses efforts promotionnels.

📉 Une mise à niveau face aux concurrents sud-américains

  • Le Chili et l’Argentine bénéficient d’accords existants avec le Brésil depuis des années.

  • L’accord UE–Mercosur corrige ce déséquilibre historique, repositionnant les vins européens dans la compétition régionale.

3. Des simplifications techniques en parallèle

L’accord prévoit aussi des engagements bilatéraux sur les procédures non tarifaires :

✅ Reconnaissance des pratiques œnologiques européennes : le Mercosur accepte les méthodes autorisées dans l’UE sans exigence de réautorisation locale.

✅ Étiquetage plus souple : certaines mentions en français ou multilingues pourront être conservées, évitant des reétiquetages systématiques.

✅ Dialogue sanitaire renforcé : création de groupes de travail pour résoudre rapidement les litiges techniques entre administrations.

4. Opportunités par pays du Mercosur

🇧🇷 Brésil

  • Marché principal de la zone ; suppression des droits sur les vins tranquilles en 5 ans.

  • Segments porteurs : rosés, mousseux, GMS et e-commerce.

🇦🇷 Argentine

  • Marché modeste à l’import ; opportunités sur les spiritueux premium.

🇺🇾 Uruguay

  • Haut pouvoir d’achat ; ouverture aux AOP confidentielles.

🇵🇾 Paraguay

  • Marché sensible au prix, à fort potentiel pour les IGP accessibles.

5. Ce qu’il faut anticiper dès maintenant

L’entrée en vigueur de l’accord ne laissera pas de place à l’improvisation. Pour capter les effets positifs dès les premières années, les exportateurs doivent concentrer leurs efforts sur deux axes :

🤝 Identifier les bons partenaires importateurs dès maintenant

  • Chaque pays du Mercosur a sa propre structure de distribution : le Brésil repose sur de gros importateurs-distributeurs, l’Uruguay sur des acheteurs très segmentés, et le Paraguay sur des importateurs très sensibles au prix.

  • Il est essentiel de cartographier les acteurs sérieux, déjà actifs sur le vin français ou européen, et de commencer à construire une relation de confiance.

  • 💬 Conseil : ne vous limitez pas aux salons internationaux — exploitez les réseaux franco-latino (CCI, Business France, anciens clients distributeurs, diaspora…).

🎯 Élaborer une stratégie commerciale “post-accord” claire et positionnée

  • Adaptez votre offre au pouvoir d’achat local et aux tendances : IGP pour la GMS, AOP pour la restauration, formats pratiques pour l’e-commerce.

  • Anticipez les nouveaux argumentaires : “0 % de droit de douane dès 2026”, “livraison directe depuis le domaine”, “packaging multilingue prêt à vendre”.

  • Investissez dans le marketing relationnel : mini-catalogues adaptés par pays, dégustations ciblées, ambassadeurs locaux ou influenceurs régionaux.

  • 🎯 Objectif : ne pas seulement être présent — mais être prêt à vendre dès que la porte s’ouvre.

📦 Encadré pratique : Résumé des actions prioritaires

1. Identifier des importateurs crédibles dans chaque pays du Mercosur
— Initier les échanges dès 2024, en ciblant les acteurs déjà actifs sur les vins européens (GMS, CHR, e-commerce), capables d’anticiper les évolutions logistiques et réglementaires.

2. Construire un plan “post-accord” adapté à chaque canal de vente
— Travailler le positionnement, le packaging, les formats, et un storytelling pertinent en fonction des attentes locales et des réalités économiques de chaque pays.

3. Préparer des argumentaires commerciaux cohérents avec les réalités du marché
— Mettre en avant : “allègement progressif des barrières tarifaires dès l’entrée en vigueur (date à confirmer)”, tout en assumant un positionnement différencié par la qualité, l’origine et la valeur ajoutée.

4. Valoriser votre présence sur les événements professionnels ciblés
— Participer activement aux salons 2025 (Tastin’France São Paulo, Vinexpo Mendoza, missions BtoB régionales) pour renforcer votre visibilité et préparer le terrain commercial.

Conclusion – Le moment de s’implanter, c’est avant l’ouverture

L’accord UE–Mercosur n’est pas une hypothèse. Il est signé, structuré, prêt à entrer en vigueur. Ce n’est pas une simple réduction de taxe : c’est une refonte des règles d’accès au marché sud-américain.

L’entrée en vigueur de l’accord offrira un nouvel espace d’opportunités pour les exportateurs de vin. Se préparer dès maintenant, c’est se donner le temps d’agir avec justesse, au bon moment, dans les bons marchés.

Vous avez encore des questions ou souhaitez aller plus loin dans votre réflexion ? Rendezvous Export vous accompagne — n’hésitez pas à nous contacter.